Botaniste, dessinatrice et céramiste
Dans la continuité de la finesse des traits de ses parents et grands-parents
Dans la maison pointue, accrochée au massif de la Serre, Lisa a un atelier avec une vue sur la forêt, le mont-blanc et le Mont-Poupet.
« J’ai été imprégnée par l’art et la musique. Ma grand-mère maternelle, Jacqueline, avait un regard sur l’art. Elle était plutôt passionnée par les fleurs à travers les tissus et le patchwork. Ma grand-mère allemande, Elsabea, peignait des plantes botaniques, des fleurs et des chrysalides. Dédiés à chacun de ses 3 enfants, elle avait réalisé trois carnets de dessin.
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Le triptyque « Source(s) » présente une évolution dans le détail.
Cela changeait selon mon état d’esprit, les nervures des feuilles étaient privilégiées selon mon énergie, car je travaille beaucoup avec les énergies des lieux. Et mon plaisir à retransmettre vers l’autre cette énergie à travers le dessin, ça me fait du bien.
Dans mon travail imaginaire, j’archive des lieux modifiés par les mains de l’homme ou simplement fragilisés par des facteurs humains telles que les abatteuses où la forêt lutte contre l’abattage.
Au fur et à mesure que je dessinais, une abatteuse faisait tomber les arbres. Il y avait alors comme une urgence à les peindre. Alors qu’elle mettait une minute à abattre un arbre, je mettais une journée à le peindre. Et en même temps, il y avait un homme de Saligney qui plantait des chênes pour ses petits-enfants, tout à côté des arbres qui étaient arrachés. Sa présence et son acte voulaient tout dire, comme un renouveau malgré tout, alors que j’étais en plein désarroi.
Par malheur et bonheur à la fois, en passant, l’abatteuse a fait tomber des fusains, que j’ai pu récupérer. J’ai d’ailleurs un projet avec les fusains. J’aimerais alors fabriquer des outils de dessin dans ce paysage effacé. Dans ce lieu, j’envisage avec d’autres artistes de faire réapparaitre de nouveaux paysages de forêt avec nos fusains fabriqués. L’idée étant de filmer toutes ces étapes. »
Approche écologique à travers la peinture
« Mon rapport à la peinture a évolué, alors que j’étais dans la contemplation et la beauté, j’ai eu la sensation d’éléments manquants et je me suis alors tournée vers la documentation pour faire apparaitre les temporalités, les coexistences inter-espèces. Mon approche de l’écologique se fait à travers l’art en présentant graphiquement la biodiversité et les liens entre la faune, la flore et l’humain.
En dessinant, cela m’a permis de comprendre les écosystèmes. C’est ma façon de mettre du sensible dans l’écologie. On pollue tellement avec l’éco-anxiété, alors que l’on peut faire passer plus de messages subtilement avec poésie. Mes dessins ont plusieurs messages à transmettre, tout en permettant aux gens de s’imprégner de mon imaginaire, en les laissant libres de leurs interprétations.
Mes dessins s’accompagnent d’une écriture et d’histoires pour sensibiliser les gens à des évènements. Par exemple, avec le réchauffement climatique et la monoculture, le cycle de reproduction des scolytes est beaucoup plus prolifère. En me détachant de ce constat par mes dessins, je souhaite rendre compte de l’existence du scolyte et de sa propre manière harmonieuse à nos yeux de dessiner dans l’écorce. C’est une ambivalence étonnante, qui montre comment la Nature a une force de résilience. Ces destructions des écosystèmes sont souvent induites par les activités humaines. Ces ambivalences se retrouvent partout, tant dans le règne végétal, qu’animal ou humain. C’est toute l’histoire du monde du vivant. »
En savoir + sur Instagram @lilicherbott
Propos reccueillis par Nathalie Rude (Romain)
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