Généralisation de la voiture électrique : forte croissance de la demande d’électricité

À partir de mon expérience d’énergéticien, et disposant d’électricité verte fournie par Enercoop et mes panneaux photovoltaïques, je me suis récemment interrogé sur l’intérêt de la chose. Une analyse des données disponibles explique ma décision actuelle de renoncer…

Le coût énergétique et écologique reste considérable

La fabrication d’une voiture est un processus industriel lourd et complexe. Il utilise en moyenne les 3/4 de l’énergie que le véhicule consommera au cours de son existence. C’est ce qu’on appelle « l’énergie grise ». De fait, le remplacement d’une voiture par une autre n’est pas un acte « neutre » pour la biosphère sauf si la voiture remplacée est vraiment au bout de sa vie et doit aller à la casse. À défaut, la détruire prématurément augmente significativement son impact environnemental. Et si celle-ci continue son existence dans d’autres mains, on augmente le parc existant, ce qui évidemment n’arrange rien : c’est « l’effet rebond »…

La fabrication des batteries est tellement émettrice de CO² qu’il faut avoir parcouru de 50 000 à 100 000 km en voiture électrique pour commencer à être moins producteur de CO² qu’une voiture thermique. Soit 15 à 30 km/jour, 365 jours par an, pendant 10 ans ! En 2013, une étude de l’ADEME(*) montrait déjà que la voiture électrique n’est pas plus vertueuse pour le climat que la voiture thermique, essence ou diesel. Presque tout le CO² émis par une voiture électrique est envoyé dans l’atmosphère avant même qu’elle n’ait parcouru son premier kilomètre !

Vantée comme solution pour moins polluer l’air de nos villes, la voiture électrique émet à peine moins de particules que la voiture thermique (par son pot d’échappement), mais les pneus, les freins et l’usure des routes émettent presque autant de microparticules qu’un véhicule diésel.

Une autonomie très limitée

En l’état actuel des choses, quoi qu’en disent leurs promoteurs, l’autonomie réelle des voitures électriques est assez limitée. Il faut donc avoir bien identifié ce qu’on veut en faire, pour ne pas se retrouver avec un outil inadapté à l’usage auquel on le destinait. Bien sûr, le poids et le coût des batteries (encore très importants, pour une capacité et une durée de vie relativement limitées) vont certainement continuer à s’améliorer. Mais pour le moment il n’y a en vue ni miracle, ni même percée technologique majeure. Faire le plein d’une voiture électrique n’est toujours pas chose simple, en dehors d’un chargeur dans le garage où la voiture passe ses nuits entre deux utilisations. Sinon, c’est galère : rareté des bornes de recharge, trop fréquente non-compatibilité des raccords électriques, complexité des formules de paiement, etc.

Si au final la voiture électrique n’est pas plus écologique que la voiture thermique, l’argent public consacré à son développement est-il justifié ? Il s’agit de sommes astronomiques ! Le gouvernement a lancé un plan d’installation de 7 millions de bornes de rechargement pour un cout d’environ 70 milliards d’euros… Que penser des élus de petites communes qui, croyant faire un geste pour l’environnement, cassent la tirelire municipale pour s’offrir une borne ?

Le bonus « écologique » à l’achat d’une voiture électrique dépasse 10 000 € par véhicule, mais ces véhicules sont très chers et une fois de plus, l’argent de tous est offert aux plus privilégiés.

Du côté des hybrides… ce n’est pas mieux

Ajouter un moteur électrique puissant et une bonne capacité de la batterie à un véhicule équipé par ailleurs d’un moteur thermique est forcément coûteux en volume et en poids, donc en consommation, matières premières et énergie de fabrication, entretien, pneus, pollution, etc., et en prix de vente ! C’est un vrai non-sens, gaspilleur et coûteux, de fonctionner d’une part en « électrique », puis de faire recharger les batteries en roulant avec un moteur classique en raison du faible rendement de la conversion énergétique.

Le nucléaire en embuscade

En réalité, au pays de l’atome, tous les moyens sont bons pour « booster » la consommation d’électricité, en baisse continue depuis des années. La généralisation de la voiture électrique entraînera une forte croissance de la demande d’électricité, qui pourra difficilement être couverte par les seules énergies renouvelables. La voiture électrique en France, que l’on peut considérer comme une « voiture nucléaire », est un levier utilisé par l’industrie nucléaire pour justifier son maintien.

diminuer les usages de la voiture

Une conclusion s’impose donc pour moi : sauf cas particulier, le plus important n’est pas de changer de voiture, mais d’en diminuer le plus possible l’usage – et aussi de le « rentabiliser » le mieux possible : covoiturage tout d’abord, prêt ou location entre usagers, et mieux encore en créant de petits « collectifs » d’utilisateurs d’un mini-parc de voitures différentes, capables de rendre service au plus grand nombre. Mais ceci est une question qui n’est pas technique et dépend exclusivement de notre bonne volonté. En attendant, on peut aussi (je l’ai fait) doter son vélo d’un moteur électrique afin d’en démultiplier l’usage au quotidien !

Louis Pinsard par Louis Pinsard, Sermange

(*) Étude ADEME (novembre 2013) : Élaboration selon les principes des ACV des bilans énergétiques, des émissions de gaz à effet de serre et des autres impacts environnementaux induits par l’ensemble des filières de véhicules électriques et de véhicules thermiques à l’horizon 2012 et 2020.

http://serre-vivante.pagesperso-orange.fr/docs/53acv_ve_vt.pdf

Voir numéro spécial de Charlie Hebdo sur les voitures électriques, dernière arnaque avant l’apocalypse, publié en juin 2022 :

http://carfree.fr/index.php/2022/07/06/voiture-electrique-derniere-arnaque-avant-lapocalypse/

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