Nos impôts sont-ils bien utilisés ?

Quand l’argent public finance le crash climatique …

En 2007 lorsque l’État s’est désengagé de l’aéroport de Dole-Tavaux, c’est parce que la plateforme existait et qu’elle ne devait nécessiter aucun investissement. Les élus du département du Jura en ont repris la gestion, jurant que si cela n’avait pas été le cas, au grand jamais ils n’auraient engagé l’argent public pour la faire exister. Dans les faits, très rapidement il fallut refaire la piste… Et depuis, année après année, ce sont plus de 6 millions d’euros de travaux qui ont été réalisés. Aujourd’hui, la piste est de nouveau à refaire ! et le programme d’investissements porté par le Département du Jura pour l’année 2021 représente un montant total estimé à 3 162 000 € HT (1).

LA CHAMBRE RÉGIONALE DES COMPTES ÉPINGLE UN DÉRAPAGE JURIDIQUE ET FINANCIER

Le rapport d’observations de la CRC sur la gestion du département du Jura rendu public en mars 2021 décrit le « dérapage juridique et financier » de la délégation de service public de l’aéroport dont « l’exécution a coûté au département 5,75 millions d’euros de plus que ce qui était prévu au contrat » sur la période 2010-2019. Somme à laquelle s’ajoute une aide massive aux compagnies aériennes (presque exclusivement à Ryanair) approchant les 13 millions d’euros, « soit près de deux fois le montant des prévisions initiales ». Dès avril 2015, le précédent rapport relatif à la période 2009- 2013 tirait pourtant déjà la sonnette d’alarme : « le risque d’exploitation repose principalement sur la collectivité et non sur le délégataire », la Société d’exploitation de l’aéroport Dole-Jura, un groupement constitué à cette époque de la CCI du Jura et de Kéolis-Airport (l’aéroport est désormais géré par la société EDEIS).

URGENCE CLIMATIQUE, C’EST COMMENT QU’ON FREINE ?

Malgré le dernier rapport du GIEC particulièrement alarmiste, malgré les mises en garde et recommandations de la Chambre Régionale des comptes qui alerte sur l’interdiction prochaine des aides d’État(2), nos collectivités locales continuent à perfuser l’aéroport de Tavaux.

Ce n’est pas parce qu’elle est partagée à plusieurs que l’aberration du soutien à l’aéroport est moins choquante !

L’agglomération du Grand Dole a voté en septembre une subvention de 150 000 €. Une aide régionale de 419 494 € doit être prochainement versée (avec un acompte de 240 000 € puis le solde au vu du bilan d’activité 2021). La Région a également inscrit dans son budget 1 581 000 € supplémentaire fin octobre 2021 afin de financer à hauteur de 50% le programme d’investissements.

En renonçant à s’engager dans la gouvernance de la plateforme, la Région laisse par ailleurs les mains totalement libres au Département du Jura pour poursuivre l’aventure avec Ryanair dont tout le monde connait les pratiques… En finançant largement une activité dépassée, la Région discrédite son discours sur l’urgence climatique et la réalité de son engagement dans la transition écologique.

par Pascal Blain

(1) Il s’agit de deux opérations de maintien en condition opérationnelle (remplacement et mise aux normes des éclairements de l’aire de stationnement des avions, d’un coût estimé à 262 000 € et constitution d’une aire de sécurité, d’un coût estimé à 100 000 €) et de deux opérations structurantes (rénovation des couches d’assise et de surface des chaussées de la piste 05/23 et du taxiway Charlie d’un coût estimé à 2 100 000 € et du remplacement intégral du balisage nocturne de la piste 05/23 par une technologie LED aux normes EASA, d’un coût estimé à 700 000 €)

(2) Lignes directrices sur les aides d’État aux aéroports et aux compagnies aériennes, JO C 99 du 04/04/2014, p. 3–34, pt 14. La Commission considère que « les aéroports ne doivent plus bénéficier d’aides au fonctionnement et doivent financer leurs activités sur fonds propres ». Une tolérance pour les aéroports de moins de trois millions de passagers par an est mise en place pour une période transitoire de 10 ans.

Pascal Blain Par Pascal Blain, président de Serre Vivante

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