et grands travaux en vue
Depuis 2019, 222 000 hectares (près de vingt fois la superficie de Paris) de forêts publiques en France subissent des dépérissements importants et un taux de mortalité inédit indique l’ONF
La cause ?
L’accélération du changement climatique à l’origine d’épisodes répétés de sécheresse et de crises sanitaires.
Chaleur et sécheresse : un cocktail très favorable à la prolifération du scolyte. Ce petit coléoptère vit sous l’écorce des arbres et se nourrit de bois jeune, grignotant petit à petit les résineux, épicéas et sapins pectinés… Sa population a littéralement explosé : il ne faut que quatre à six semaines entre la ponte et l’envol de l’insecte adulte. Ces conditions climatiques, où s’enchaînent sécheresse l’été et hiver doux pour la 3e année consécutive, sont aussi une source de stress hydriques pour les arbres dont la résistance se trouve ainsi amoindrie face aux attaques des parasites dits « de faiblesse » …
Il faut abattre les arbres
Pour tenter de limiter l’expansion de cette épidémie, point d’autre solution que d’abattre les arbres scolytés très rapidement. Il faut inactiver les grumes en les débardant en écorce et les transporter hors forêt, soit via un stockage à plus de 5 km des massifs forestiers, soit pour les transformer rapidement, avant que le scolyte n’ait fini son développement. Pour les peuplements les plus impactés, des coupes rases seront certainement pratiquées. Cette épidémie, préoccupante pour la santé des forêts et des écosystèmes concernés, inquiète aussi les professionnels de la filière bois. Habituellement valorisés comme bois de charpente et de menuiserie, les épicéas altérés par le scolyte sont en effet déclassés par les scieurs, en raison notamment du développement d’un champignon qui les accompagne et qui vient bleuir le bois. En Franche-Comté, 3 millions de m3 d’arbres pourraient avoir déjà été infestés (soit près de 40 années de récolte !). Cet afflux inhabituel de bois dépérissant, en France comme en Europe, a entraîné une chute des prix lors des ventes de bois dès l’automne 2018. Dans le Jura, le prix d’un arbre sur pied est passé de 65 € à 15 ou 20 €.
Certains exploitants envisagent aujourd’hui des coupes « préventives »
pour tenter d’enrayer la multiplication des parasites quitte à devoir réinstaller des plateformes d’arrosage des grumes, comme après la tempête de 1999, pour les conserver jusqu’à la vente. Et les résineux ne sont pas les seuls fragilisés par les changements climatiques : le hêtre par exemple (12 % de la surface forestière régionale) connaît des phases de dépérissement suite aux sécheresses-canicules. Une modification profonde des forêts est en cours. Le réchauffement climatique est dix fois plus rapide que la migration naturelle des essences forestières.
Replanter en anticipant les changements climatiques
Dans les cinquante prochaines années, l’ONF estime que 60 % des territoires occupés aujourd’hui par les grandes essences forestières (chêne, hêtre, sapin, épicéa, pin sylvestre) sortiront des limites climatiques acceptables par ces essences majeures. Pour assurer la pérennité de la forêt, il est nécessaire d’envisager le remplacement des résineux par des peuplements plus mélangés qui auront une plus forte résistance aux maladies, aux parasites et donc au dérèglement climatique.
Par Pascal Blain, président de Serre Vivante
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