De formidables ambassadeurs pour la nature et sa préservation
Bilan de la répartition et de l’état de santé des populations d’oiseaux de Franche-Comté
Invité par Serre Vivante, Samuel Maas, ornithologue à la LPO Franche-Comté, est intervenu vendredi 6 décembre 2019 à la salle communale de Fraisans (39)
Les oiseaux sont encore parmi nous
Le chant des oiseaux apporte chaque année son lot de bonheur en sortie d’hiver, lorsque les jours s’agrandissent et que les tempéra-tures deviennent plus clémentes. Ces dernières années les printemps se font de plus en plus silencieux et devant les différents constats d’érosion de la biodiversité aux 4 « coins » du globe, la LPO Franche-Comté a fait paraître en 2018 un livre sur les oiseaux, pour valoriser l’ensemble des connaissances acquises sur notre territoire depuis une soixantaine d’années. Devant 38 participants attentifs, Samuel Maas a retracé les grands enseignements de ce livre, complet et richement illustré, rédigé par un collège d’experts locaux.
Si 430 espèces d’oiseaux ont été observées au moins une fois en Franche-Comté, 300 sont considérées comme régulières, dont 202 se reproduisent au printemps sur le territoire comtois.
La liste rouge des oiseaux nicheurs, labellisée IUCN et CSRPN, mise à jour pour l’occasion de cette parution, met en avant 41 % d’espèces menacées. Certaines espèces sont classées :
- CR (n=31), en danger critique d’extinction telles que blongios nain, cigogne noire, busard cendré, râle des genets, pie-grièche grise…
- D’autres sont classées EN (n=16), en danger, telles que petit gravelot, vanneau huppé, courlis cendré, moineau friquet…
- Ou encore VU (n=28), vulnérables telles que caille des blés, tourterelle des bois, torcol fourmilier, tarier des prés…
- Les autres espèces nicheuses (59 %) sont classées parmi les catégories NT, potentiellement menacée ou LC, préoccupation mineure.
Différents constats peuvent être réalisés
En premier lieu celui d’une banalisation des peuplements d’oiseaux, reflet d’une augmentation des oiseaux généralistes dont la niche écologique est très large (=présent dans différents types de milieux), au détriment des oiseaux spécia¬listes dont la niche écologique est très étroite (=présent dans un milieu en particulier).
C’est une véritable perte de la richesse patrimoniale micro-locale qui s’opère! Pire encore, les espèces autrefois considérées communes commencent elles aussi à régresser… si cela ne se voit pas sur l’aire de présence, restée inchangée ces dernières décennies, cela se traduit par une baisse des effectifs, parfois remarquablement élevée et sur des pas de temps très courts.
Ces constats, loin d’être des cas isolés, sont malheureusement partagés quelle que soit l’échelle considérée – Franche-Comté, France, Europe, Amérique – et les facteurs avancés sont partout les mêmes :
- agriculture intensive,
- destruction et fragmentation des habitats,
- surexploitation des ressources,
- pollution et bio-contamination,
tout ceci placé dans une immense cocotte-minute intitulée « changement global », qui agit comme un super catalyseur !
Vous l’aurez compris, l’Homme tient une part majeure dans cette érosion sans précédent de la biodiversité et pour que la tendance s’inverse, ce ne sont pas des « petits pas » qui sont attendus par les spécialistes. Oiseaux des milieux agricoles -40,7 % en Bourgogne–Franche-Comté, des milieux bâtis -23,5 %, des milieux forestiers -15,3 %…
Pourtant tout n’est pas encore perdu
Si la volonté d’agir est vraiment présente, les solutions existent et portent leur fruit : exemples avec la cigogne blanche ou le faucon pèlerin, qui ont failli disparaître du territoire dans les années 70, mais qui, grâce à l’action de l’Homme, ont pu reconquérir leurs territoires désertés.
Si pour certaines espèces il est déjà trop tard pour agir en Franche-Comté, d’autres comptent sur nous. Chacun à son niveau peut faire quelque chose pour ces espèces en danger :
- En tant qu’employeur ou salarié : gestion douce des espaces verts de votre entreprise, incitation de mécénat de compétence, adhérer au collectif Cedre…
- En tant que citoyen : soutenir les associations de protection de la Nature en adhérant, gestion douce du jardin, installation de nichoirs, réduction de son impact sur l’environnement, interpeller nos élus, ne pas laisser divaguer les chats domestiques (ou avec une clochette alors!)…
Les populations d’oiseaux étant capables d’une grande résilience, il ne tient qu’à nous de décider dans quel monde nous souhaitons vivre demain. Les solutions existent, mais sommes-nous prêts à les mettre en place dès aujourd’hui? Si nous tardons trop, une partie de la Vie disparaîtra et avec elle une partie de notre Humanité…C’est une véritable perte de la richesse patrimoniale micro-locale qui s’opère!
En savoir + > http://franche-comte.lpo.fr/
Par Samuel Maas, Ornithologue LPO Franche-Comté
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