au temps de la Renaissance …

Au XVIe siècle, de très nombreux comtois servent fidèlement leurs souverains Habsbourg. A leur mort, sur le modèle des princes, certains d’entre eux firent réaliser de superbes monuments funéraires qui témoignent toujours de leurs destins, de la vitalité de la création artistique de la Renaissance comtoise, véritable âge d’or historique et artistique.

Des matériaux locaux de qualité

Au XVe siècle, l’albâtre extrait des carrières de Saint-Lothain, de Salins ou d’Aresches, est utilisés pour la réalisation des prestigieux tombeaux des ducs de Bourgogne dans la chartreuse de Champmol, puis, dans le premier tiers XVIe siècle, pour celle des émouvants transis des tombeaux de Marguerite d’Autriche et de Philibert de Savoie son époux dans l’église de l’abbaye de Brou. Très réputées également, les pierres marbrières jurassiennes sont très régulièrement mises en oeuvre pour d’autres créations d’art funéraire de la Comté.

Guillaume de Visemal à Rahon

Dans l’église de Rahon, un tableau sculpté scellé dans le mur droit de la chapelle familiale, présente les figures agenouillées, en albâtre du Jura sur fond rose de pierre de Sampans, de Guillaume de Visemal seigneur de Frontenay, d’Aresches et de Bretenières et de Marie de Chaussin sa seconde épouse depuis février 1529. Dans la disposition d’origine, les regards de ces personnages représentés dans une attitude de prière étaient tournés vers l’autel, autrefois placé sous la baie éclairant la chapelle. Chacun d’eux regardait également une statue : celle de saint Guillaume de Gellone pour lui, et celle de sainte Barbe pour elle. Marie mourut le 21 décembre 1535 après avoir donné naissance à leurs enfants : Henri et Guillemette. Guillaume décéda quant à lui le 12 juin 1548. L’albâtre permet de représenter très fidèlement le moindre détail de l’armement de Guillaume : son épée à quillons recourbés, suspendue à la ceinture par une double lanière, ses gantelets, son armet à bavière mobile, la cubitière à oreillons qui protègent son coude et le soleret en pied d’ours qui protège son pied. A ses côtés, le chien symbolise la fidélité, mais aussi et surtout la foi. Le chien est également le guide dans le royaume des morts. Comme le Christ sur la croix Guillaume prononce cette phrase : « *Entre Tes mains, Seigneur je remets mon esprit *», phrase gravée en latin près de son visage, depuis sa bouche. Il en est de même du riche vêtement de Marie et de sa coiffe appelée chaperon. Celle-ci prononce un extrait du psaume 50 « Ayez pitié de moi Seigneur, selon Votre grande miséricorde ».

Antoine de Montmartin à Poligny

Initialement placé dans la collégiale Saint Hippolyte de Poligny mais actuellement conservé dans l’église Notre-Dame de Mouthier-le- Vieillard, ce tombeau de calcaire est, sans nul doute, l’un des plus émouvants de la région. Il présente en effet la défunte allongée, les cheveux défaits, sur son lit de parturiente fait de branchages tressés, et en train d’allaiter son nourrisson. Antoine de Montmartin, épouse de Jean de Poupet, premier gentilhomme de la chambre et proche conseiller de Charles Quint est décédée à Bruxelles des suites d’un accouchement. L’Histoire se souvient que « Cette dame issue d’une puissante & illustre famille du Comté de Bourgogne, fut l’une des plus belles personnes & des plus vertueuses de son tems : elle joignoit aux talents & aux graces qu’une excellente éducation lui avoient acquises, un fonds de bonté & un caractère de générosité qui lui méritèrent à la cour de Bruxelles une réputation décidée de beauté, de graces & de sagesse : elle faisoit les délices de cette Cour. Outre sa langue maternelle, elle parloit bien le Toscan, l’Allemand & le Flamand : elle possédoit aussi l’art de la musique & celui de toucher supérieurement des instruments. La mort la ravit à Bruxelles le 12 mars 1553 dans la vingt-neuvième année de son âge : elle fut universellement regrettée

Les frères d’Andelot à Pesmes

Que tous voient, grands et petits, à quel état ils seront réduits […] pourquoi l'orgueil ? car tu es poussière et comme moi tu reviendras cadavre fétide, nourriture des vers, et cendre …

Cette chapelle funéraire, contigüe à l’église de Pesmes, est un joyau de la Renaissance comtoise. Les décors d’architecture, le sol et la statuaire conjuguent magnifiquement l’emploi de la pierre noire de Miéry, de l’albâtre du Jura et de la pierre rose de Sampans.

Elle est dédiée à la mémoire de Jean d’Andelot mort en 1556, capitaine et bailli de Dole, premier d’écurie de Charles Quint et de son frère Pierre, chapelain honoraire de l’empereur, abbé de Bellevaux mort en 1560.

Pascal Brunet par Pascal Brunet, historien de l’art, Besançon.

Texte rédigé suite à la conférence organisée à Menotey par l’Université Ouverte de Dole le 24 novembre 2017 .

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