La vigne conservatoire de Champagne sur Loue

un gros travail

La communauté de communes du Val d’Amour mit à la disposition de l’association un terrain d’environ 5 ares à Champagne sur Loue, à l’extrémité nord de l’appellation Côtes du Jura. Ensuite, avec l’aide de la société de viticulture, de l’INRA de Montpellier et d’un pépiniériste spécialisé, une recherche des plants existants avant le phylloxéra fut réalisée.

Ce fut un gros travail car la Franche Comté comptait, à cette époque, un nombre tout à fait surprenant de cépages différents : plus d’une quarantaine. La recherche sur des vielles vignes a même entraîné la découverte de cépages non répertoriés par Rouget, le vigneron ampélographe de référence de l’époque.

Après l’établissement d’une convention le 26 septembre 2007 entre la Société de Viticulture, l’association de vignerons et la Communauté de Communes, l’Office National Interprofessionnel des Vins autorisa une plantation expérimentale de ces cépages sur une surface limitée. L’année 2008 vit donc l’aboutissement d’une longue démarche car tous les plants furent contrôlés en laboratoire pour s’assurer de leur authenticité et de leur état sanitaire.

20 550 : C’est le nombre d’hectares de “vitis vinifera” recensé dans le jura en 1896, dont il ne restera plus que 500 hectares en 1900

Le conservatoire aujourd’hui

La vigne comprend trois parties. A l’entrée, un parking avec un abri, des tables et 5 panneaux explicatifs. Ensuite, la plantation de cépages d’avant le phylloxéra (5 pieds par cépage) identifiés par des panneaux et palissés en partie sur échalas, en partie sur fils de fer. La dernière partie accueille des hybrides plantés localement après le phylloxéra et avant les appellations de 1935.

A quoi sert une vigne conservatoire ?

• A sauvegarder la diversité biologique mais aussi la tradition : chaque plant avait sa particularité. Le teinturier apportait la couleur, l’enfariné l’acidité, le poulsard la finesse, le gamay la rondeur. En fonction de la qualité de la vendange, il fallait savoir bien assembler les cépages pour faire un vin équilibré. Cet empirisme ne pouvait être payant qu’avec l’expérience des générations précédentes tant les cas de figures sont nombreux.

• A sauvegarder le savoir faire : certains plants nécessitaient des méthodes de taille, de conduite, de culture différentes et, avec leur disparition ; disparaît le savoir faire qui s’y rattache. La vigne est toujours liée avec de l’osier.

• A préserver l’avenir : il est évident qu’avec le réchauffement climatique ; nous aurons besoin des qualités de plants aujourd’hui délaissés ; disposer de ce patrimoine génétique et être en capacité de le multiplier constitue sans doute une bonne précaution contre les aléas climatiques.

le trousseau le trousseau
• La vigne conservatoire est un bon support pédagogique pour les classes et autres groupes qui s’y succèdent. Des enfants de tous les niveaux sont accueillis à la vigne et des élèves des classes découvertes de la ville voisine font régulièrement les vendanges.

• Vocation touristique : les responsables associatifs reçoivent des groupes de randonneurs et les promeneurs isolés ont les panneaux explicatifs pour se renseigner. L’accès à la vigne est signalé dans tout le secteur.

Le trousseau couvre 5% du vignoble. Les ceps trapus et vigoureux montrent de nombreuses feuilles arrondies ainsi que des grappes cylindriques. Les baies à peau noire et épaisse sont charnues et sucrées. Les plants sont tardifs et donnent un vin coloré, tannique et de longue garde.

Tout récemment, les douanes ont autorisé la vinification de la récolte, tout du moins ce qu’il en reste après le jus offert aux vendangeurs ! Le vin est travaillé en pétillant appelé « Perles d’Antan ». L’étiquette mentionne tous les cépages anciens. Un vin, avec plus de 40 cépages différents, il ne doit pas y en avoir beaucoup, ni en France, ni ailleurs ! C’est une grande fierté pour des vignerons amateurs et passionnés.

Paul Guilley par Paul Guilley, Menotey

Le saviez-vous ?

Au XIXe siècle, la vigne s’étendait sur 20 550 hectares dans le Jura. Selon un recensement réalisé par le Salinois Charles Rouget, une quarantaine de cépages étaient alors cultivés en Franche-Comté. Mais en important des plants des États-Unis, on a aussi importé des maladies : l’oïdium, le mildiou et le phylloxéra font des ravages. Louis Pasteur, le père de la microbiologie, met au point des traitements dans sa vigne et dans son laboratoire arboisien. Parallèlement un autre jurassien, Alexis Millardet, pose les principes du greffage des plants sur souches américaines. Celles-ci sont plus résistantes aux maladies et cette découverte se révèle essentielle pour le monde de la viticulture. En 1935 naissent les appellations d’origine contrôlée (AOC). Cinq cépages seulement, jugés les plus qualitatifs pour la production jurassienne, restent autorisés. Ceux-là même que l’on connaît encore aujourd’hui : poulsard, chardonnay, savagnin, trousseau et pinot

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